Sujet du Magazine n°4 : Co-fondateur de Kanavape, la 1ère e-cigarette au CBD, Sébastien Béguerie a ouvert le débat sur la légalité du cannabidiol en France. Sept ans de réfléxion judiciaire qui ont permis l’émergence d’un nouveau marché dont il peut se vanter d’être le père fondateur. Il en sort relaxé mais il en a payé le prix. Même si l’on a tout dit, ou presque, sur cet épisode ô combien riche en rebondissements et en enseignements, lui n’a pas dit son dernier mot.
Lors de vos déboires avec l’administration, depuis 2015, qu’est-ce qui a été le plus dur ?
Le plus dur a été de subir la foudre médiatique et les déboires de la justice, sur la base d’accusations montées de toutes pièces, dans le seul but de vouloir me faire passer pour un trafiquant international. Émotionnellement, cela a été très difficile à gérer pour moi, avec ma famille et mon cercle d’amis qui ont commencé à douter de ma sincérité, en m’évitant pour ne pas avoir affaire à un délinquant poursuivi par l’État français. Ma mère a énormément pleurée pendant cette période, redoutant de voir son fils aller en prison. Tout ceci a été très compliqué à gérer. Parce que mon produit était révolutionnaire, j’aurais pu être très tôt un leader du CBD en France, avec des chiffres d’affaires à plusieurs millions d’euros tout en ayant la reconnaissance de mon savoir-faire. Mais au lieu de ça, tout s’est retourné contre moi, au point qu’il m’a fallu quitter la France pour partir à l’étranger. J’étais au bout du rouleau, sans argent, avec de terribles idées noires qui me traversaient l’esprit. Grâce à mon parcours d’Aïkidoka, j’ai appris à garder la tête froide et à me battre pour avancer, ce qui m’a aidé à ne pas baisser les bras et surtout, à ne pas faire de bêtises qui aurait pu mettre ma vie en danger.
« J’ai parfois le sentiment d’avoir été un Templier, en croisade pour la rédemption de la filière CBD »
La décision de la CJUE en novembre 2019 a ouvert la voie à l’industrie du CBD en France. Ce qui vous confère un statut de porte-étendard ! C’est quelque chose dont vous êtes fier ?
La décision de la CJUE fut un grand soulagement et une bouffée d’espoir dans la tournure de mon procès en France. C’est réellement à ce moment-là, que j’ai vu l’impact que cela a eu sur le marché français et européen. Je m’en suis réjouis et cela m’a forcément rendu fier d’avoir pu contribuer à ce point à la valorisation du secteur du CBD en France et en Europe. C’est gratifiant de voir maintenant ce marché prospérer comme il le mérite. A la suite du rendu de l’avocat général de la CJUE, la France a dû modifier sa loi de 1990 sur le chanvre. Je me félicite de cette avancée majeure car d’une certaine façon, mon initiative de départ avec Kanavape était bien de démocratiser et valoriser les produits dérivés à base de cannabinoides légaux issus du chanvre. A travers mon affaire, j’ai quelquefois le sentiment d’avoir été tel un Templier en croisade pour la rédemption de la filière CBD. Mais je suis heureux de l’engouement que cela a créé quand je vois des groupes de la grande distribution à s’intéresser au CBD, et comme on peut aussi le voir avec les commerces de proximité et les pharmacies qui vendent aujourd’hui des produits au CBD bien-être. Suite à ce nouveau contexte j’ai pu relancer ma marque Kanavape via le site www.kanavape.eu
« J’entends bien demander réparation à l’État français pour les pertes que j’ai subies »
A ce jour, que vous a coûté, financièrement, cette affaire ?
C’est difficile de l’estimer exactement après 7 ans de procédures judiciaires. Mais entre les coûts de déplacements, les avocats, les conseils de spécialistes et mon temps perdu, je pense que j’aurais pu m’acheter un petit appartement en centre-ville. Si en plus j’ajoute les pertes liées à la contrainte de ne pas avoir exploité ma marque comme je le voulais, alors le préjudice financier se monte à plusieurs millions d’euros. J’entends bien aujourd’hui demander réparation à l’État français pour les pertes que j’ai subies.
« Pourquoi ne pas envisager en France, une légalisation suivant l’exemple du Canada !? »
Avec Antonin Cohen, votre associé, vous vous êtes séparés en cours de route. Divergences d’opinions ou choix de vie personnels ?
Un peu des deux, divergences d’opinion et de choix personnels mais aussi récemment d’adresse URL, depuis que j’ai pu relancer Kanavape.eu. Néanmoins, je suis sûr que nous allons pouvoir trouver un terrain d’entente. Nous avons pu surmonter l’attaque frontale de l’État, nos différents aujourd’hui sont peu chose en comparaison avec ce que nous avons déjà traversé.
L’arrêt de la cour de cassation du 23 juin a-t-il influencé la décision finale de l’affaire Kanavape en novembre dernier ?
Le rendu de la Cour de cassation a envoyé un signal fort, poussant les autorités françaises à envisager une réglementation plus large sur la question du cannabis légal incluant les fleurs. Ceci dit, cet arrêt n’a pas eu d’impact direct sur mon affaire puisqu’il s’agit d’e-liquide au CBD légal dans son pays d’origine, en République Tchèque. De ce fait, le rendu de la CJUE a suffi à prouver mon innocence des chefs d’inculpations à mon égard, ce qui m’a valu ma relaxe.
Comment voyez-vous l’évolution de la législation en France ?
Je vois que la France va vers un marché régulé, ouvert à tous les produits dérivés du CBD, y compris les fleurs, et même si cela prendra plus de temps que pour les produits dérivés. Mais inévitablement, la France suivra le chemin de la Belgique et du Luxembourg qui ont légalisé les fleurs avec une taxe fiscale comme il est pratiqué pour le tabac. De plus en plus d’influenceurs consomment des produits CBD, ce qui alimente le buzz et la popularité du CBD pour le bien-être des gens. Cela va permettre de sortir de l’idéologie politique et des débats émotionnels autour de la question du cannabis qui anime tous les fantasmes. Pourquoi un jour ne pas envisager la légalisation du Cannabis en France comme en parle l’Allemagne, suivant l’exemple du Canada !?
Revenir en France, pour développer vos gammes plus efficacement, fait-il partie de vos projets ?
Je me développe déjà sur le marché français avec ma marque wellness « Alpha-Cat » et ma marque lifestyle californien « Golden Buds ». J’aime mon pays et ma région, la Provence, avec tous ses délices culinaires, sa tradition en herboristerie et son légendaire savoir vivre. De plus, la plupart de mes clients partenaires-distributeurs sont français. J’aimerais créer en France et remettre au goût du jour les traditions de cette belle région, avec son savoir-faire en phytothérapie. D’ailleurs, le mot Canebière vient du provençal « Canèbe » qui signifie ; l’endroit où est le chanvre. Il sera très intéressant de voir le positionnement de la France sur les produits issus de ses territoires, peut-être pourquoi pas bientôt imaginer des AOC pour les produits à base de CBD !?
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